Kwon Na Yung avait l’impression d’être dans cette immense serre silencieuse et obscure depuis des heures. Sans avoir aucune prise sur le temps ni sur l’espace. La course avait succédé à la marche et, pourtant, Na Yung n’avait pas la certitude de progresser. Essoufflé, il s’arrêta un instant et se courba. Les mains en appuie sur les cuisses pour reprendre sa respiration du mieux qu’il le pouvait. Le silence toujours présent était à lui seul assez impressionnant. Surtout qu’à l’ordinaire, bon nombre de demoiselles entouraient notre captain de leur corps sveltes et délicats. Lui accordant ce trop-plein d’attention dont il avait constamment besoin. Soudain, Na Yung se crispa. Une douleur fit son apparition et lui arracha un cri craintif. Par chance, sa réputation n’en prit pas un coup vu qu’il se trouvait seul en ce lieu. Du moins, il l’espérait grandement. Il se redressa brutalement et se cambra sous l’effet de la souffrance. Puis il tordit son bras en arrière pour essayer d’atténuer la douleur. Sauf que… cela ne se produisit pas, au contraire, cet acte augmenté la souffrance. Néanmoins, ne se laissant pas abattre, il reprit le pas, déterminé. Après tout, il était le grand Kwon Na Yung, l’invincible Nana ! Cela lui plaisait bien de penser ainsi. Rien de très arrogant, juste, il se sentait confiant et serein. Néanmoins, plus Na Yung courait, plus la végétation devenait dense et sauvage. Comme si la nature avait soudain décidé d’interrompre la quiétude du jeune homme. Le jardin s’obscurcissait à tel point que notre geobuk devait faire d’énormes efforts de concentration pour le distinguer dans ce petit brouillard qui faisait son apparition. Quoique, il ne le savait pas lui-même, si tout ceci était un immense brouillard. La tâche devenait plus difficile à chaque enjambée et faisait grimper le sentiment de panique de Na Yung. Il se haïssait de ne pas pouvoir mieux se contrôler. Ce n’était qu’une serre, des plantes, rien de très surprenant et effrayant tout de même ! Pourtant, il ressentait un atroce affolement lui faisait perdre à la fois ses moyens, et surtout un temps précieux. Notre Kwon Na Yung avait juste l’intention de s’entrainer un peu au quidditch tout seul pour améliorer sa frappe. Il n’aurait jamais imaginé avoir un tel obstacle. S’était-il trompé de chemin ? Fort probable. La première fois qu’il venait ici. Tout paraissait si impérieux. Normal qu’il se trompait de route donc. Toutefois, le terrain de quidditch ne devait pas se trouver bien loin. Au pire, il indiquerait à ses camarades sa position, puis ceux-ci viendraient à sa rescousse. Ce n’est pas comme si Na Yung ne possédait pas de recours. Beaucoup de personnes l’appréciaient. Le minimum de personne se ferait du souci pour lui si aucune nouvelle n’était donnée. Na Yung ne discernait presque plus le chemin envahi par les fougères qui lui griffaient le visage et par les longues herbes qui entravaient sa course, plus périlleuse que jamais. Consternation. Il cherchait une solution à son périple. Utiliser son bâton ne semblait pas une bonne idée. Que ferait-il entouré de toutes ses branches ? Risquer d’anéantir son propre bâton n’était pas envisageable. Il tenta alors un sort contre les plantes. Sauf que nous savons tous que celui-ci n’est pas un des meilleurs élèves de l’académie, au contraire… Sans grande réussite. Sa stratégie s’avérait ainsi peut efficace sur les plantes. Cependant il ne perdit pas espoir et essaye un nouveau sort. Oui. Un nouveau sort provenant de son imagination. Censé réduire en cendre les plantes. Il ne comprenait pas lui-même ce qu’il baragouinait. Et pourtant il y mettait du sien. Certainement quelques erreurs dans sa phrase. L’effet désiré n’était toujours pas escompté. Au dépourvu, il se planta devant un arbre majestueux et s’y adossa, faisait mine de réfléchir.

Il ne comptait plus le nombre d’arbres auxquels il s’était accoté. Arrêtant constamment le pas pour reprendre des forces. Il distingua, stupéfait, un miroitement nacré au milieu de cette serre ténébreuse. D’abord à peine perceptible, le scintillement s’éclaircit ensuite, au fur et à mesure que le jeune goebuk approchait. Lorsqu’il atteint enfin celui-ci, sans le savoir, il se retrouva projeté au travers. Pris au dépourvu, il ferma aussitôt les yeux, perplexe, redoutant ce qui l’attendait à l’autre bout. Il roula sur le sol. Le cadre était complétement différent. Toute trace de verdure avait disparu, comme évaporée. Il n’en restait qu’une partie infime. Dans le ciel, un soleil voilé, immense, propageait des lumières pâles qui diffusaient sur le paysage, les alentours, une lumière assez fantomatique. Quelle atmosphère lugubre. Ses jambes commençaient à lui faire cruellement mal. Il entreprit donc de s’assoir dans le peu d’herbe qui se trouvait devant lui. Après un petit moment, la douleur avait diminué en intensité, le laissant pantelant et épuisé. Mais il devait garder la tête haute. Notre captain est vaillant ! Il recouvrait enfin ses esprits puis passa une main sur sa cheville. Il observa les alentours, ses coéquipiers n’étaient toujours pas arrivés. Sans doute était-ce une mauvaise blague dont Na Yung subissait les frais. Après tout, ce fut la faute de l’un d’eux si le jeune homme s’était perdu dans les serres. Certainement un plan machiavélique inventé par notre cher Hika. Mh.. celui-ci avait une dent contre le captain depuis des lustres ! Na Yung en mettait sa main au feu ! Il lui voulait des misères ! Et il ne se privait pas de lui en faire voir de toutes les couleurs. Bien que… le captain des geobuk ne s’en rende pas vraiment compte et qu’Hika ne semblait pas être coupable pour autant. Cela lui plaisait de penser ainsi. Il scrutait encore les alentours, personne ne pointait le bout de son nez. AAH… les misérables ! Ils ne s’en sortiraient pas indemne de sitôt. Na Yung esquissa un sourire en coin, assez malsain comme à son habitude, il réfléchissait à un plan, une stratégie de vengeance. Tout était de leur faute!

Soudain, stupéfait, il sentait le contact d’une personne qui l’étreignit fortement. Na Yung passa tête de côté. C’était Yukie Kumiko, la capitaine de l’équipe des muneo. Elle était d’une beauté magnétique qui irradiait autour d’elle lorsque la demoiselle avait un franc sourire aux lèvres. Na Yung l’examina attentivement, sous le coup de l’émotion. Ses traits d’une finesse extrême étaient à peine altérer par la justesse du sport qu’elle pratiquait. Ses yeux, d’un noir intense, illuminaient sa peau blanche et soyeuse. De grande taille, elle était vêtue d’une tenue simple, sombre, presque austère, coupé dans un tissu très souple qui soulignait sa silhouette mince. Na Yung s’inclina. La demoiselle était certainement venue pour s’entraîner elle aussi. Toute seule ? Intéressant. Notre Kwon reprit son calme et se leva sans ménagement pour faire face à Kumiko.

« Tiens donc. Qu’avons-nous là ? Yukie Kumiko, capitaine des muneo. Enfin capitaine… Es-tu venue me rendre compagnie comme toutes ces groupies ? Ou tes coéquipiers t’auraient-ils lâché en réalisant qu’une demoiselle ne pouvait guider et mener son équipe à la victoire ? Ne fais pas l’enfant. Tu devrais plutôt jouer ton rôle de demoiselle et encourager ton équipe dans les tribunes en portant une tenue de pompom ! Haa… oui, de pompom. Cela t’irait à ravir, mh ? Laisse donc la place à un homme normalement constitué diriger cette équipe. Je conseille ceci dans ton propre intérêt. Penses aux muneo, à leur visage exprimant de la tristesse s’ils venaient à perdre à cause de toi. »

Dit-il, un sourire narquois apparut sur son visage, tandis qu'il haussait un sourcil tout en croisant les bras, comme si tout ceci ne fut qu'une constatation des plus innocentes. Il voulait que celle-ci comprenne et réfléchisse à son acte. Mais surtout, il souhaitait rabaisser la jeune femme avec son air hautain et hébété. Parce que oui. Bien entendu. Comment une demoiselle pourrait-elle entreprendre une telle tâche ? Cela n’était pas envisageable. Sottises. Absurdités. Elle ne ferait que perdre un temps précieux à tout le monde avec ses caprices.