La famille. Cela avait toujours été une signification particulière pour Sachiko. En effet, la jeune femme considérait que la famille était & devait avoir une place importante dans chaque vie. Sans la famille, l’Homme n’était pas celui qu’il devait être. La famille était l’un des piliers de la vie, quoiqu’il arrivait, quoiqu’il pouvait se passer, la famille était importante. Pour diverses raisons. Tout d’abord, la famille était un lieu pour prospérité y régnait, c’était un endroit qui se devait d’être agréable. Même si les choses n’étaient pas toujours très positives, la famille devait être pour la vision de chaque Homme, un moment de partage, d’allégresse, de bonheur. Pas quelque chose purement négative, cela n’était en aucun cas bon signe. Ensuite la famille était certainement la seule chose qui restait jusqu’à notre mort. De notre naissance jusqu’à ce que l’on redevienne poussière, la famille était à nos côtés. La famille ce n’était pas comme les amis, on ne pouvait pas en perdre un & en avoir un autre du jour au lendemain. C’était quelque chose de fixe & de durable. La famille était toujours là. Certes il pouvait y avoir certains problèmes causés justement par cette fameuse famille, mais les soucis familiaux se géraient souvent rapidement ou alors restaient ingérable. Sachiko ne savait pas vraiment ce qu’était une famille au sens propre du terme, elle s’imaginait juste une définition totalement positive du sens de la famille. Elle avait raison, c’était inéluctable, mais elle était aussi très loin de la vérité, car dans la famille il n’y avait pas que des aspects positifs & dans la plupart des familles, les aspects négatifs primaient sur le côté bon de la famille. Il y avait perpétuellement des conflits, entre frères, entre sœurs, entre cousins, entre cousines. Il y avait toujours une part d’injustice dans les familles, il y avait toujours une personne mise en avant & une personne mise dans l’ombre. La famille était aussi source de complications, malgré ce que Sachiko essayait de se faire croire. Elle-même, elle savait que parfois, la famille était plus un poids qu’autre chose. La famille n’était pas toujours là pour nous sortir de la noyade, elle était même parfois l’élément qui avait déclenché cette profonde torpeur. Alors forcément, la famille n’était pas toujours une chose très bienveillante. Il y avait des choses qui étaient profitables & d’autres, c’était l’inverse. Sachiko avait toujours eu un enseignement basé sur la famille où on lui apprenait les bases de la famille, que la famille ne pouvait faire aucun mal & même si elle pensait croire en ses saintes paroles, elle savait pertinemment que la famille n’était pas que agréable & qu’il y avait de nombreux points noirs. Toutefois, elle essayait de se voiler la face, de se dire que ce n’était pas le cas car elle voulait croire en quelque chose de totalement bon & non pas ayant des mauvais côtés. C’était peut-être une utopie complètement faussée. C’était peut-être des pensées absurdes, mais au moins elle avait de l’espoir. Sa famille n’était pas parfaite, voir complètement imparfaite, mais elle trouvait toujours des raisons à ses défauts. Elle tentait de trouver des excuses à chaque membre qui n’apportait pas que de la joie. Elle était naïve dans ce domaine, mais c’était surtout de la naïveté voulue. Ses cousins lui avaient fait énormément de tort dans son enfance, mais jamais elle ne les avait tenu rigueur de leurs comportements exécrables vis-à-vis d’elle. Elle continuait de les apprécier, sans vraiment porter une quelconque attention sur leurs actions dépourvus d’une once d’amabilité. Sachiko avait pris la décision de voir la famille ainsi & de tout pardonner, ce qui n’était malheureusement pas le cas de tout le monde & pourtant, cela était favorable pour les états d’âmes.

Sachiko ne savait pas pourquoi Ren rejetait tellement sa famille, de manière si violente. Elle ne comprenait surtout pas qu’il désire oublier sa propre famille, sa sœur jumelle, plus particulièrement. Elle ne savait pas ce qui avait poussé Ren à vouloir oublier à tout prix sa sœur, à vouloir l’oublier de différentes manières, mais elle trouvait que c’était tout simplement quelque chose d’impardonnable. Il s’était peut être passé quelque chose de grave, elle n’en savait rien, elle n’était pas dans leur vie, elle n’était pas de leur famille, elle avait été une simple voisine. Elle n’avait jamais voulu s’immiscer explicitement dans leur vie, dans leur famille. Elle avait été certes une voisine que l’on pouvait qualifier de régulière car elle avait passé de longues journées chez eux, auprès d’eux, mais ce n’était pas pour autant qu’elle avait quelque chose à voir avec leurs conflits familiaux. Pendant plusieurs années elle avait tenté de rester en dehors de leur histoire. Elle avait caché sa curiosité qui n’avait cessé de grandir dans le creux de son ventre. Elle s’était tut pendant longtemps, très longtemps. Elle avait arrêté de demander à la famille Yamada où se trouver Ren, car elle avait très vite constaté que leurs regards changeaient à l’écoute de son prénom & que toutes les versions étaient complètement différentes. Elle avait pourtant essayé de s’infiltrer à un endroit caché pour entendre la conversation entre ses parents & ceux de Ren, mais jamais elle n’avait eu la chance d’entendre un seul mot prononçait qui pouvait alors l’intéresser. Elle avait alors tenté maintes approches auprès de sa sœur, Satsuki, dont elle était proche, mais celle-ci lui avait toujours répondu sèchement, comme si aborder le sujet de son frère jumeau était jumeau. Il était comme interdit de prononcer son prénom quand elle était là car cela la mettait dans une colère noire, presque frustrante. Sachiko avait très vite compris les haussements d’épaules de ses parents, l’antipathie de Satsuki à chaque fois, les mensonges de la famille Yamada, il était arrivé quelque chose à Ren ou alors il y avait eu quelque chose qui avait tout bousculé. Finalement au bout d’un an, Sachiko n’avait plus rien demandé, elle s’était contentée de faire comme si Ren n’avait jamais été son voisin, car c’était ce que tout le monde semblait faire. Sauf qu’au fond d’elle-même, elle avait toujours su qu’il avait été présent. On n’oubliait pas facilement son premier voisin & surtout son premier ami. Elle avait passé presque toute son enfance auprès de lui & sa sœur, alors forcément, sa mémoire ne pouvait tout oublier seulement si on le lui demandait. Il lui fallait du temps & malheureusement, le temps, elle ne l’avait jamais eu.

Elle s’était retrouvée dans la même maison que Ren, comme par hasard. Elle avait été surprise au départ de le voir ainsi mais elle avait tout de même immédiatement reconnu, ce qui n’avait pas été le cas du jeune homme. Il avait même été jusqu’à lui parler encore plus froidement que sa sœur. Elle s’était alors demandée si ce n’était pas de famille ou s’ils ne s’étaient pas tous ligués contre elle. Pourtant, elle n’avait rien fait, en tout cas c’était ce qu’elle pensait. Elle avait toujours été douce avec Ren, avec la famille Yamada & elle ne récoltait que leurs irritations. Par conséquent, voir Ren devenir à son tour complètement énervé à l’évocation de sa sœur, avait été un élément déclencheur de sa curiosité si longtemps enfouie. Elle avait tenté de le raisonner, d’avoir des explications, mais elle n’avait rien reçu en retour, juste un peu plus chaque jour son mécontentement. C’était après tout ce qu’elle méritait. A force d’insister, cela devenait fortement insupportable & on finissait par faire des gestes violents. Sachiko savait qu’un jour elle allait recevoir la violence de Ren, mais elle n’avait pas peur. En tout cas pas maintenant. Certes au départ, elle avait craint ce nouveau Ren totalement différent de celui qu’elle connaissait autrefois & puis elle avait pris l’habitude. Sachiko savait qu’à force d’agir ainsi elle allait se brûler les ailes, mais elle, elle voulait juste aider son ami, ce qui n’était sûrement pas de son point de vu. Il ne voyait pas cela comme une perche tendue pour le sauver, mais plutôt pour l’enfoncer. Le problème avec la jeune femme était que lorsqu’elle voulait avoir quelque chose elle faisait tout pour l’avoir. Elle persistait, dépassant même les limites parfois. Elle était malheureusement comme cela & son tempérament n’allait pas changer de sitôt, même si elle pouvait paraître désagréable.

Lorsqu’elle se joignit à Ren dans les couloirs, elle sentit immédiatement que l’atmosphère s’était modifiée & qu’il ne semblait pas du tout ravi de la voir, au contraire. Elle fit tout de même une grimace car voir que son ami ne la considérait même plus comme une simple amie la peinait quand légèrement. Il ne comprenait vraiment pas qu’elle faisait tout cela dans le but de l’aider & non pas de l’importuner. Il ne ressentait donc plus aucune once d’amitié à son égard. Etait-elle une parfaite inconnue ? L’avait-il vraiment oublié ? Ne ressentait-il plus que de la haine pour elle ? Les moments passaient à s’amuser entre eux n’étaient-il que futilités ? Elle ne l’espérait pas. Sachiko était une Yunikon & il fallait donc comprendre que l’amitié avait une place importante. Ce qui n’était pas le cas de son soi-disant ami, ce qui rendait sa présence chez les Yunikons encore plus étrange. Il n’avait pas l’étoffe d’être une licorne, il aurait été mieux chez les Ineos, ces personnes si froides & la plupart du temps sans âme. Ren convenait parfaitement à cette maison. Il n’avait plus d’âme, la sienne avait totalement disparue, comme si elle n’avait jamais existé. Auparavant, il en avait une & Sachiko se sentait à chaque fois nostalgique dès qu’elle y repensait. Ren n’avait plus rien de ce voisin qu’elle avait tant apprécié. Il n’était plus qu’une ombre inintéressante. Malgré cela Sachiko persévérait, comme si elle savait que quelque part le petit garçon qu’elle avait connu était toujours à ses côtés. Toute personne aurait baissé les bras, ils auraient tous abandonné, mais elle, non. Elle s’acharnait encore & encore jusqu’à trouver ce qu’elle cherchait, jusqu’à parvenir à son objectif. Elle ne pouvait laisser Ren dans cet état, même si l’envie l’accablait régulièrement.

Soutenant son regard, elle tenta de rester calme. Elle ne devait pas être déstabilisée par ce regard si froid, si pénétrant. Elle le regarda donc de la même manière que lui le faisait. Elle poussa finalement un soupir quand il s’adressa à elle. Elle eut un simple rire sournois.

- Je vois que l’amabilité te coupe le souffle. Un simple bonjour Sachiko serait trop te demander je suppose. Mais on va faire comme si tu avais prononcé cette simple politesse qui te brûle tant les lèvres, je suis certaine.

Décidément, même un bonjour était impossible à prononcer pour lui. C’était lamentable & surtout énervant. Il ne lui demandait même si elle allait bien, il ne se souciait vraiment pas d’elle. Elle serra les poings. Il avait beaucoup trop changé à son goût. De plus, elle était certaine qu’il savait le motif de sa venue vers lui. Ce n’était pas comme si elle ne venait pas tous les jours pour lui dire les mêmes paroles. Elle voulait tellement lui faire comprendre certaines choses, qu’il lui dise ce qui n’allait pas mais elle savait qu’aujourd’hui encore ses initiations allaient être vaines.

- Epargne-moi ta salive inutile si c’est juste pour me parler sur ce ton & surtout pour me demander directement ce que je veux car tu sais très bien la raison de mon arrivée vers toi. Je veux juste que tu te souviennes d’elle, que tu arrêtes de me dire que tu es fils unique & surtout que l’on ne se connait pas. Je suis ton amie Ren, je suis là, à ton écoute, mais tu ne sembles plus le voir. Dis-moi ce qui te pèse tant & arrêtes immédiatement ta comédie en me faisant croire que l’ancien Ren n’est plus là.

Elle avait prononcé cela avec une telle spontanéité qu’elle était elle-même surprise par ses propos. Elle le pensait vraiment & pour une fois, elle ne s’attardait pas sur des détails superflus, sur des devinettes absurdes. Elle le regarda une dernière fois, intensément, comme si elle s’apprêtait à lui annoncer une terrible nouvelle.

- Satsuki, ta sœur, souviens toi au moins d’elle s’il te plaît ; dit-elle d’un ton presque suppliant..